Interview PETER HARPER

INTERVIEW MANUSCRITE #56 – PETER HARPER @ DIEGO ON THE ROCKS @ CAROLYN

INTERVIEW DE PETER HARPER PAR DIEGO*ON*THE*ROCKS

Originaires de Californie, les trois frères HARPER furent élevés dans la culture musicale du Folk Music Center and Museum de Claremont dans le magasin que les grands parents ont fondé en 1958. PETER, le plus jeune de la fratrie et fan de surf, commença une carrière de sculpteur sur bronze avant de sortir son premier album éponyme en 2013 qui récolta un succès d’estime dans l’hexagone. Aimé des Français, l’artiste revient en 2020 avec un troisième effort intitulé « Survive » qui sera disponible cet été. Lors de son passage à L’Accordeur de Saint Denis de Pile (33) le 17 janvier, il a accepté de répondre aux questions de Diego pour Musiques En Live. Les photographies sont de Carolyn Caro.

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DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Est-ce que cela fait du bien de revenir en France pour cette tournée d’hiver ?
PETER HARPER  : Lorsque je reviens en France, j’ai le sentiment d’être dans ma deuxième maison… comme en Californie! J’adore ce pays qui est l’autre nation de mon coeur après les Etats-Unis. Parfois même avec DONALD TRUMP, j’ai l’impression que mon premier pays est le vôtre! (rires)
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Parlons de ton dernier EP « Twilight Time ». Pourquoi ton logo est un rhinocéros sur une guitare représentant la pochette ?
PETER HARPER  : J’utilise toujours le rhinocéros comme logo dans tous mes disques. Mon label aux USA s’appelle LAST 3 RHINOS et pour « Twilight Time », je voulais conjuguer la force du rhinocéros avec la musique. J’ai créé cette image pour la pochette de l’EP afin de représenter la balance entre ces deux influences.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Deux de tes chansons récentes parlent particulièrement d’amour, je pense à « Twilight Time » et « Hold My Hand ». L’humain peut-il vivre sans amour ?
PETER HARPER  : Non! Scientifiquement c’est possible de vivre sans amour mais une vie complète sans amour est impossible. C’est marrant car en parlant Français je me rends compte avec mon accent Américain que « L’amour » et « La mort » se prononcent presque pareils…
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : C’est clair! D’ailleurs parfois l’amour mène à la mort!!!
PETER HARPER  : C’est vrai mais l’amour est le sujet le plus récurrent de nombreux artistes et c’est primordial.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Une autre chanson d’amour « Carnival Ride » n’est-elle pas plus complexe ? L’hésitation dans les sentiments ?
PETER HARPER  : Lors d’une longue relation avec quelqu’un, il y a des hauts et des bas. « Carnival Ride » qui peut se traduire par « Tour de Carnaval » en Français voudrait dire « Morceau de vie ». La comparaison avec le carnaval est comme pour les fêtes foraines, la vie de couple est une montagne Russe faite de haut et de bas. Parfois cela tourne même en rond! « Carnival Ride » résume toute l’expérience d’une relation de couple.
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DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Toujours dans le même esprit, « Higher Road » relate cette recherche de l’être unique ?
PETER HARPER  : C’est intéressant car certains titres parlent de la recherche d’amour et d’autres de l’impossibilité à trouver la bonne personne. « Higher Road » est l’opposé de « Carnival Ride » car c’est un titre triste qui parle d’une personne qui trouve sa recherche de l’amour interminable et sans issue.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Le dernier titre de l’EP, « Quite Like You Do » est un hommage aux parents ?
PETER HARPER  : C’est une chanson blues qui ne désigne pas l’interlocuteur. Le chanteur relate comment il est persuadé de ne jamais obtenir l’équivalent des sentiments qu’il est capable de donner à quelqu’un d’autre, amoureux ou relationnels. Quelqu’un de renfermé dans son coeur. Le texte dit « Personne ne t’aime autant que toi », c’est à la fois égoïste et tristement réel. Cela n’a rien à voir avec ta gentillesse ou ta cruauté. Le bien, le mal, le bon le mauvais. Je ne donne pas mon avis et laisse l’auditeur interpréter le texte en fonction de son expérience. Il peut s’appliquer à n’importe qui.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Ton prochain album « Survive » est toujours prévu pour l’été 2020 ?
PETER HARPER  : Oui, l’album a été enregistré et est prêt. Ce soir à L’Accordeur je vais chanter deux nouveaux titres inédits qui seront sur l’album. Les titres de « Twilight Time » ne seront pas repris dans « Survive », il s’agit de 10 chansons originales.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Tout à l’heure lors des répétitions je t’ai entendu jouer un titre de BRUCE SPRINGSTEEN, j’ai adoré ta version acoustique.
PETER HARPER  : Merci! J’aime beaucoup ce chanteur et « I’m On Fire » est un de mes titres préférés. J’ai adapté la version, notamment la fin. J’en ai parlé avec mon frère BEN surtout lorsque nous faisons des reprises. Nous étions d’accord sur le fait qu’une bonne reprise doit être musicalement adaptée. On conserve les paroles originales mais l’artiste doit créer sa propre version. Si tu veux écouter la version originale, tu prends le CD ou vas sur Spotify! Nos voix étant différentes, je tente de m’approprier son titre sans prétention particulière.
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DIEGO*ON*THE*ROCKS  : SPRINGSTEEN a toujours été un chanteur très engagé. Un titre comme « Break The Cycle » que tu as sorti dans ton album de 2017 est une chanson politique ?
PETER HARPER  : C’est une chanson politique que j’ai écrite après les attaques au Bataclan de 2015. Nous avons tous eu un sentiment de ras-le-bol car les terroristes sont allés trop loin. Les individus que nous sommes, Français, Américains, Irakiens n’avons pas commencé cette guerre et ne pourront rien faire pour la stopper. Il s’agit de décisions gouvernementales et des conséquences de leurs actes. Les concerts sont des endroits où les spectateurs se rendent comme dans une église… nous célébrons et partageons ensemble. Les gens viennent pour une expérience, pas pour être tués. On a retrouvé une action de guerre dans une salle de concert Parisienne… Où la violence s’arrêtera t’elle ? Certes un chanteur ne peut arrêter une guerre mais il peut écrire une chanson et c’est le sujet de « Break The Cycle ». Après le 11 septembre, notre pays n’a cessé de balancer des bombes en Afghanistan, détruisant des écoles et des hôpitaux…
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Certains appellent ça des dommages collatéraux!
PETER HARPER  : Plutôt que de balancer des bombes et tuer des gens, nous devrions répondre par l’éducation et l’aide à ces peuples. La violence apporte la violence, nous sommes responsables et ce n’est pas la bonne méthode.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Un sujet beaucoup plus léger : Lorsque tu étais petit, tu as vécu avec tes deux frères au milieu d’un magasin entourés de tous les instruments possibles et inimaginables. Comment as-tu pu devenir sculpteur de bronze avant d’être musicien ? (rires)
PETER HARPER  : Dans ma famille, tout le monde joue d’un instrument. Lorsque j’étais petit, j’ai voulu faire autre chose qu’un « HARPER classique » et je me suis investi dans la sculpture sur bronze. L’idée est venue alors que je jouais avec un outil et de la terre. J’ai commencé à tenter de sculpter des formes en 3D et me suis rendu compte que j’étais doué pour cet exercice. Plus j’en faisais, plus les sculptures étaient grandes… voilà comment PETER HARPER est devenu sculpteur!

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : D’ailleurs quels sont les points communs entre la sculpture et la musique ?
PETER HARPER  : C’est une bonne question! Lorsque je crée une sculpture, je suis mon instinct qui me dicte quoi faire. Une sculpture est immobile mais reste vivante. Lorsque j’écris une chanson, je prends une partie, une deuxième, une troisième puis comme un architecte je fonde mes « étages » de création par étapes successives. Riff après riff, parole après parole, je sculpte ma chanson. Les deux sont de l’art. Le but est d’arriver au top. Quelque part lorsque tu joues un titre en live, tu « sculptes » l’air avec ta musique! C’est ce qui donne à l’auditeur la sensation d’apprécier où non un titre.
Le sculpteur Américain ALEXANDER CALDER a créé des sculptures mobiles qu’il serait difficile de comparer avec la musique. C’est une forme d’art différente.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Tu as étudié la sculpture au Zimbabwé? Quels souvenirs en conserves-tu ?
PETER HARPER  : Je conserve beaucoup de souvenirs de cette période qui a complètement changé ma façon de voir les choses. C’est ma plus belle expérience, elle a changé ma mentalité. Ce qui est incroyable c’est qu’aux ETATS-UNIS je suis Afro-Américain, donc pas 100% Américain. Au Zimbabwé je suis un Américain-Blanc, donc pas 100% Africain!
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Si aux USA tu es noir et qu’en Afrique tu es blanc, qui es-tu ?
PETER HARPER  : Le concept de race n’existe pas. C’est difficile de s’identifier et quelque part dans ma tête je me suis dit que ce n’était pas grave. Je suis comme je suis, noir, blanc, ce n’est pas important. On subit la perception des autres. Le principal est d’être soi-même. Cela explique aussi pourquoi mon expérience Africaine a changé irrémédiablement ma perception de la vie.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Tu pourrais être gris comme MICHAEL JACKSON ? (rires)
PETER HARPER  : (explosion de rires)

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : La famille HARPER est artistique. Peut-on imaginer un jour un album des frères HARPER ? Car BEN a sorti un album en duo avec ta mère en 2014!
PETER HARPER  : Il faut poser la question à BEN! C’est lui l’artiste connu de la famille et je ne suis que le petit frère! Concernant l’album « Chillhood Home » avec ma mère ELLEN, j’avais trouvé ça fantastique. Je pense que toutes les mères gagnent à être connues, la mienne en fait partie.
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DIEGO*ON*THE*ROCKS  : En France tu es comme en famille, tu entretiens une relation particulière avec le sud-ouest ?
PETER HARPER  : Oui, j’ai commencé dans le sud-ouest avant de jouer ailleurs. J’ai pas mal de gens qui me suivent ici et 4 fans de mes débuts ont organisé ma première tournée en 2014. Sans agent ni booking-manager. L’un d’entre eux s’appelle FARID, c’est mon fan numéro 1 et il est présent ce soir. Je le remercie. Nous nous sommes connus en Californie, j’avais sculpté une boucle de ceinture pour lui. Tout le monde connaissait BEN HARPER mais pas PETER HARPER. Grâce à eux, je peux exercer une de mes passions en France, pas seulement dans le sud-ouest! C’est un vrai plaisir de jouer en live devant mon public Français.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Tu es d’autant plus attachant avec ton public que tu vas à sa rencontre après le spectacle et que tu (essaies) de parler Français sur scène ?
PETER HARPER  : Pour comprendre une culture, il faut comprendre la langue. Souvent je demande mes mots aux Français pour m’exprimer et je progresse de jour en jour. J’aime cet échange ou tu donnes de ta personne et reçois des autres. La culture Française est très riche et c’est un honneur d’avoir été compris et bien reçu par le public. C’est un signe de respect et j’ai beaucoup évolué depuis 2013. Chaque tournée est bénéfique.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Quels sont les artistes qui t’ont influencé ?
PETER HARPER  : Ma grand-mère! Au Folk Music Center de Claremont, j’allais voir ma grand-mère après l’école. Ayant du temps car j’attendais que ma mère finisse de travailler au même endroit, ma grand mère me faisait des démonstrations de tous les instruments existants! Elle savait tout jouer, c’était incroyable! Elle m’a inspiré. Sinon j’ai été élevé avec STEVIE WONDER, STEVIE NICKS, NWA, BOOGIE DOWN PRODUCTIONS, PUBLIC ENEMY, KRS-ONE, CYPRESS HILL et plein d’autres… il y avait tellement de bons groupes! J’écoutais aussi SAM COOKE, DOLLY PARTON, KENNY ROGERS, PETE SEEGER. En fait, j’ai été élevé au son de la Pop-Folk, du rap et de la country.

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DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Les titres des autres que tu aurais aimé composer ?
PETER HARPER  : Y’en a beaucoup aussi… Lorsque je chante une de mes chansons, je retrouve le même plaisir à toutes les interprétations. Comme une première fois. Quand je chante une reprise, la première fois est différente et intéressante, mais ne l’ayant pas écrit, je crée un nouveau titre musical avec les mots de l’artiste original. Mes chansons favorites sont changeantes avec le temps. A ce jour, je dirais SPRINGSTEEN « I’m On Fire » qui est incroyable, « Talking Bout’ A Revolution » de TRACY CHAPMAN ainsi que « Jolene » de DOLLY PARTON. C’est la raison pour laquelle je joue certaines de ces chansons en concert dans des versions folks. J’aime aussi beaucoup un titre de DRAMARAMA qui s’appelle « Anything Anything ». C’est du rock qui date de 1985.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Merci beaucoup PETER pour cette interview. Bon concert et à bientôt pour une tournée estivale!
PETER HARPER  : Oui pour mon nouvel album. Merci Diego et Carolyn.

Remerciements : Fred & Caroline de L’Accordeur à Saint Denis de Pile / Music’Action (Fred & Stella)
Photos : Carolyn Caro
Relecture : Jacky G.