COCOON ITW MeL

INTERVIEW MANUSCRITE #44 – COCOON @ DIEGO ON THE ROCKS @ CAROLYN

INTERVIEW DE COCOON PAR DIEGO*ON*THE*ROCKS

Tout d’abord, un énorme remerciement à Mark Daumail qui nous a reçu dans son studio d’enregistrement. A cette occasion, il a accepté d’interpréter un morceau en acoustique dont le lien est présent dans cette interview.
COCOON créé en 2005 vient de sortir son 4ème album studio baptisé « Wood Fire ». Alors que l’artiste a donné une série de concerts intimistes en juin 2019 (« Spark Warm Up Acoustic Show »), il reprendra la route en décembre et se produira au Rocher de Palmer de Cenon le 17 janvier 2020.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : « WOOD FIRE » est la suite personnelle de ton album « WELCOME HOME » qui parlait de ton enfant. Qu’est-ce qui t’a mené d’un disque à l’autre ?
COCOON : « WELCOME HOME » marquait la renaissance de COCOON après 5 ou 6 ans d’absence sous une autre forme avec d’autres membres. J’avais envie de recréer ce projet folk que j’ai en tête depuis 15 ans. A la naissance de mon fils, j’avais envie de lui faire un disque car son arrivée au monde fut compliquée suite à quelques soucis de santé aujourd’hui réglés. Nous avons fréquenté les hôpitaux quelques temps, cela est traumatisant.
Le thème de la famille étant mon sujet de prédilection dans la musique, j’ai voulu faire un album me concernant en temps que jeune papa. Ces faits ayant eu des conséquences sur notre vie de parents et de couple, l’idée à germé de réaliser un disque pour ma femme. « WOOD FIRE » est le négatif de « WELCOME HOME ». Après le côté papa, je parle du couple même si les chansons ne sont pas toutes autobiographiques.
COCOON ©Carolyn.Caro 10

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Donc le contenu est inventé ou vécu ?
COCOON : Les deux, c’est un mixe! Pour la première fois j’ai partagé l’écriture des textes. Je suis parti plusieurs fois à Los Angeles car la musique Anglophone en France n’existe quasiment plus. Je me considère comme un « highlander » de la musique pop mainstream avec JAIN et JEANNE ADDED. La mode actuelle est à la chanson Française et à l’urbain, pas du tout dans mon style créatif. D’ailleurs je suis parti avec JEANNE et GAETAN ROUSSEL à L.A. dans des « writing camp », lieu où sont réunis des artistes ayant « chartés » en France pour bosser avec des gens ayant « chartés » aux Etats-Unis. C’est comme un grand séminaire ou tu côtoies des personnes ayant travaillé pour RIHANNA. C’est BMG qui a des bureaux sur Nashville, New York, Londres, Shanghai, L.A. ou Paris qui nous a envoyé sur place. En comparaison c’est comme la ligue 1 de foot Français qui rencontrerait la ligue nationale locale. On travaille beaucoup et le fait de rencontrer plein de paroliers m’a permis de composer 60 ou 70 titres incluant une majorité de déchets. Les petits moments « de grâce » permettent d’extraire 12 chansons qui ont donné cet album. Joyeux, tristes ou désespérés, les textes parlent tous du couple comme un feu de bois, « WOOD FIRE » en Anglais. Le but de ce voyage était de raconter mon histoire à d’autres et de partir de chez moi. La mixité des gens rencontrés est un atout car ils écrivent des choses géniales et très pop. Ils font 8 textes par jour et t’apprennent à désacraliser une chanson. Je suis rentré chez moi avec des heures et des heures de musique qui se concrétisent par un album de 40 minutes. « WOOD FIRE » est mon premier vrai disque d’amour.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : As-tu été ailleurs qu’à Los Angeles pour ce disque ? Comment as-tu rencontré les voix de « WOOD FIRE » ?
COCOON : Oui, en Toscane et en Israel. J’aime le mélange des voix féminines pour COCOON. Pour le choix des partenaires, c’est le hasard. OWLLE je l’ai rencontré dans une soirée à L.A., on est devenu amis malgré sa fibre électronique. LOLA MARSCH a une voix type LANA DEL REY et c’était l’occasion de voyager. On s’est retrouvé à Tel Aviv, c’était génial. Concernant CLOU, la maison de disque a senti que « Back To One » serait un single radio et qu’il fallait réaliser une version Française. Nous subissons la loi des quotas! J’ai adoré son phrasé découvert sur Instagram. Elle a une voix sublime et j’ai essayé cette chanson en Anglais et Français. Mon label BARCLAY m’a fait confiance et fonctionne à l’ancienne avec les radios. On en a besoin pour promouvoir un album.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Pour remplacer MORGANE IMBEAUD, il te faut une présence féminine ?
COCOON : MORGANE est irremplaçable. J’ai crée COCOON en faisant le premier album seul puis j’ai rencontré sa « voix » suite à un casting effectué avec DENIS CLAVAIZOLLE qui a bossé pour MURAT et BASHUNG. MORGANE avait la particularité d’avoir une voix sublime et de jouer du synthé.
Maintenant c’est un réflexe, j’ai besoin d’avoir des voix féminines pour mes albums. MORGANE ne reviendra pas, je ne vois pas l’intérêt, elle s’est sacrifiée pour mes chansons et a voulu faire ses trucs « pour elle ». Je la comprends même si j’aimerais qu’elle revienne juste pour un titre…

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : « Back To One » est très electro-pop, « I Got You » une superbe ballade langoureuse, comment nait un morceau écrit par MARK DAUMAIL ?
COCOON : Je prends des notes en permanence et ai des milliers de mémos. Je réalise des collages avec Pro-Tools et imagine les chansons. C’est comme du bricolage musical, le texte ne vient qu’après. Les songwriters travaillent souvent avec ce système de « mémos ». Je crois peu au morceau ingénieux qui tombe par hasard lorsque tu prends ta guitare en mains, même si cela m’est arrivé comme pour « Ashes ». Cela arrive une fois par disque, c’était le cas de « Chupee » à l’époque. Un titre comme « We Do The Same » est un assemblage de 14 mémos différents que j’ai collé, et c’était la galère!

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : A t’on déjà comparé ton style musical à JAMES BLUNT et ta voix à BEN HARPER ?
COCOON : Non. J’ai rencontré BEN HARPER plusieurs fois et j’adorerais qu’il fasse un featuring sur un de mes prochains titres. Merci, c’est un compliment car j’aime beaucoup ce qu’il fait. JAMES BLUNT beaucoup moins.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Pourquoi avoir fait une tournée WARM UP en juin avec quelques concerts intimistes avant la sortie de ton album ?
COCOON : C’est stratégique. Je voulais occuper le terrain avant la sortie de l’album. C’est promotionnel et cela m’a permis de tester mes nouveaux morceaux. Avant nous faisions les tournées des forums Fnac pour annoncer un disque, c’était angoissant. Maintenant tu joues entre le rayon aspirateurs et ordinateurs, c’est pas terrible! Je l’ai récemment fait à Bordeaux, uniquement parce que c’est ma ville.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Restons côté concert, comment se présente la tournée à venir qui commencera le 12 décembre à Marseille ?
COCOON : Compliquée dans le sens où tout le monde est très frileux! Soit tu fais de « l’Angèle », soit tu fais de « l’urbain » mais les salles prennent moins de risques pour remplir. J’ai la moitié de mes potes qui annulent leurs tournées… comme TALISCO par exemple! C’est hyper difficile… comme je le disais tout à l’heure, même en étant le « highlander » de ce genre musical, il faut se battre et nous sommes toujours considérés en développement. Il y a des coupes budgétaires incroyables.
COCOON ©Carolyn.Caro 7

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : C’est quoi le problème, ton style musical ne rentre pas dans les cases habituelles ?
COCOON : C’est ça! C’est fou mais toute ma génération comme THE DO, MORIARTY, AARON et LILLY WOOD AND THE PRICK, y’en a plus! Je suis pas certain que ma tournée fasse 230 dates mais étant nouvellement réalisateur pour d’autres artistes, cela me permettra de continuer dans cette branche. Actuellement les tickets se vendent bien et je suis surpris des premiers retours. Néanmoins, mon booker (CORIDA) pense que la période est compliquée et je suis du même avis. Depuis 2 ans tout a changé, disque ou concerts. Le « Champagne » ne concerne que 5 ou 6 artistes et derrière faut se battre et travailler. Artiste n’est plus du tout un métier de branleur! On ne vit plus sur ses acquis car il y a trop de disques qui sortent et beaucoup de concerts qui se montent. L’urbain prime pour les nouvelles générations.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Parle-nous de tes collaborations, STEPHAN EICHER, BENABAR…
COCOON : STEPHAN j’ai produit son avant dernier disque, « L’envolée » en 2016. Nous avions réalisé entre la Camargue, la Provence et la Suisse avec les musiciens de CALEXICO, LAMBSHOP et EDITH FAMBUENA. J’avais 28 ans et dirigeais des mecs qui avaient deux fois mon âge! J’ai beaucoup appris avec STEPHAN, c’est un vrai. BENABAR c’est grâce à ERIC JEANJEAN qui est de Libourne et animateur sur RTL2. Mon nom est sorti du chapeau en tant que producteur lors d’un repas entre amis! Nous nous sommes rencontrés dans la région de Marseille en buvant des coups! Je ne me suis occupé que de la musique et il est devenu un de mes meilleurs amis. J’ai aussi bossé avec BAPTISTE W. HAMON, il fait de la Folk Française et a fait des duos avec MIOSSEC et BONNIE ‘PRINCE’ BILLY. J’ai travaillé avec VANESSA PARADIS sur son dernier single « Vague à l’âme soeur » qui sortira fin novembre avec son nouveau best-of. On a fait beaucoup de Skype entre Los Angeles et Bordeaux. J’ai accompli un rêve d’enfant car l’album a été mixé par TCHAD BLAKE qui a fait LAST SHADOW PUPPETS, ARCTIC MONKEYS, PETER GABRIEL ou PEARL JAM. Je vais prochainement réécrire pour VANESSA. Sinon actuellement je bosse sur une jeune chanteuse qui s’appelle NED et je prépare une musique pour une série NETFLIX dont je n’ai pas le droit de dire le nom! (rires)
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : D’ailleurs il me semble que tes chansons ont servi à pas mal de musique de pubs ?
COCOON : Oui et cela a bien contribué au développement du groupe. La pub a pu m’aider a financer les albums qui ont moins marché. Aujourd’hui cela a changé, les entreprises préfèrent mettre des millions d’euros dans une musique de pub avec les ROLLING STONES que de mettre en avant les jeunes talents. J’ai aussi fait la musique du film « L’arnacoeur » avec VANESSA PARADIS et ROMAIN DURIS. Je bosse aussi avec MARTIN SOLVEIG sur une musique pour enfants et rédige un livre qui devrait sortir en 2020, « Petit coeur ».

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Tu as fait beaucoup de reprises dans ta carrière, lesquelles aurais-tu aimé écrire ?
COCOON : J’adore « Jenny Wren » de MC CARTNEY sortie en 2005, « Waiting for the moving van » de DAVIS ACKLES, un illustre inconnu! J’adore ELLIOTT SMITH avec « Angeles » que l’on trouve sur la B.O. de « Good Will Hunting »… y’a des tonnes de chansons que j’aurais aimé écrire, souvent des songwriters.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : MARK DAUMAIL est-il spectateur de concert ?
COCOON : Pas trop. J’ai l’impression qu’on me l’a fait un peu à l’envers! Connaissant toutes les ficelles, j’ai peur d’être déçu. Par contre j’irais bien voir SKRILLEX ou TAYLOR SWIFT, des gros blockbusters. Récemment j’ai vu CATE LE BON à l’Iboat et DEERHUNTER. Je préfère écouter en disque.
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Et tes meilleurs souvenirs de scène ?
COCOON : Souvent c’est parce que la salle est mythique. Les concerts à La Cigale de Paris sont mes meilleurs moments! J’y suis passé la dernière fois en 2016, c’était génial. On l’a joué « à l’ancienne » en se mettant derrière le rideau à l’ouverture du spectacle… Tu te sens mal et la sensation est incroyable! Evidemment l’Olympia est impressionnant. J’ai aussi des souvenirs sur mes concerts à New York, il y a une énergie différente même si le public reste Francophone. Tu as 70% de Français pour 30% d’Américains. Le Bowery Ballroom m’a laissé de grands souvenirs. A New York tu trouves autant de Français qu’à Orléans! J’ai aussi joué devant 300 personnes à Chicago ou au Texas, les spectateurs sont Américains et amateurs de musique indépendante.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Le challenge est sympathique! Tu côtoies des artistes Bordelais ?
COCOON : J’ai monté mon label qui s’appelle YUM YUM et ai signé mon premier groupe CHIEN NOIR. C’est un mec qui vient de A CALL AT NAUSICAA. Il est en train de monter en flèche. J’adore ce qu’il fait et nous avons bossé ensemble sur CARLA BRUNI, VANESSA PARADIS et NED. Il est passé à Darwin au CLIMAX récemment. Sinon sur Bordeaux j’aime beaucoup Romain d’EIFFEL. Nous avons des amis en commun. Je suis aussi très copain avec JULIEN GRANEL qui est Bordelais. C’est un landais très gentil. Il y a aussi le groupe Folk WILLOWS dont Paul est mon batteur dans COCOON. ROBERT & MITCHUM sont mes potes… DANIEL ANTOPOLSKY un fermier de Fargues Saint Hilaire! Il a 70 ans, est un Américain beatnik et a bossé avec TOWNES VAN ZANDT.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Belle famille que celle de l’entourage de COCOON! Tu aimes tes fans qui te le rendent bien, parle nous de la COCOON CLASSROOM ?
COCOON : COCOON est un groupe qui a des centaines de vidéos de reprises de nos titres. J’ai eu l’idée de créer une communauté COCOON, nous devons être environ 2000, et je donne des cours tous les 15 jours en expliquant comment j’écris les morceaux. Ils s’enregistrent et m’envoient leurs vidéos, les meilleurs reçoivent des cadeaux. Sur l’album précédent, j’ai pris les 20 meilleures reprises et nous avons joué à La Sorbonne! C’est passé sur France 2, un super souvenir.
Pour ce nouvel album c’est un nouveau concept. J’invite les gagnants à jouer sur scène. Tous les soirs, il y aura quelqu’un issu de la COCOON CLASSROOM qui jouera avec nous.
COCOON ©Carolyn.Caro 26
DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Une sacrée bonne initiative qui doit ravir tes fans! Dernière question, la plus sérieuse : Tu es le parrain de l’association LES LIENS DU COEUR à l’hôpital Haut-Lévèque de Pessac. Parle-nous en:

COCOON : C’est une association qui a pour but d’aider les enfants hospitalisés du coeur. Cet hôpital est le deuxième plus performant en France après Necker à Paris. Mon fils a eu des soucis a la naissance et a eu besoin de soins intensifs. Le hasard fait que les infirmières passaient du COCOON aux enfants! j’ai cru à une caméra cachée! Tu es en larmes car ta chair a des difficultés et tu entends ta musique! Ils m’ont expliqué que la musique avait un rôle énorme et l’idée est venue de faire des petits concerts. Cela a permis de ramener un peu d’argent, pas pour acheter des Playstations mais pour développer des technologies existantes.
J’avais été touché par le fait que le papa ne peut rester avec l’enfant, faute de place. Il n’y a qu’une place pour la maman… je te raconte pas dans quel état tu rentres chez toi en laissant femme et nourrisson le soir! Des enfants du monde entier viennent à Pessac. Ils ont obtenu l’autorisation de construire un bâtiment pour les parents. J’y retourne régulièrement pour mon fils et pour donner quelques concerts destinés à lever des fonds. Dans les parrains, il y a aussi des restaurateurs et des sportifs. Je fais ce que je peux avec mes petites mains.

DIEGO*ON*THE*ROCKS  : Bravo Mark pour cette belle action. Bonne chance pour la promotion de « Wood Fire », beaucoup de concerts à venir et merci pour l’interview!
COCOON : Merci, à bientôt.

Photos : Carolyn