JON ITW MEL arkea arena

INTERVIEW MANUSCRITE #95 – ARKEA ARENA @ DIEGO ON THE ROCKS

INTERVIEW JON POTIEZ – ARKEA ARENA – PAR DIEGO*ON*THE*ROCKS

Tous les Bordelais mélomanes qui se respectent ont assisté à un concert à l’Arkéa Arena de Floirac depuis ce fameux soir de janvier 2018 où DEPECHE MODE l’a inauguré ! Alors que ce lieu de rassemblement n’avait pas encore ouvert ses portes au public, Musiques En Live avait rencontré Marie-Philippine Perrin (* lien de l’interview du 18/10/2017 en bas de page) et découvert en avant-première ses possibilités pratiques, sonores et visuelles.
 
Naturellement et après cette période sanitaire difficile, Diego est retourné dans l’antre des spectacles Girondins pour connaitre les perspectives du groupe LAGARDÈRE en rencontrant M. Jonathan Potiez, directeur développement et marketing.
 

 
DIEGO : Jon, peux-tu te présenter succinctement aux lecteurs de Musiques En Live ?
JON POTIEZ : Je suis directeur développement et marketing pour LAGARDÈRE LIVE ENTERTAINMENT, qui est une filiale du groupe LAGARDÈRE. Cette dernière à deux activités principales : la gestion de salles de spectacles (Les Folies Bergère, le Casino de Paris, l’Arena du Pays d’Aix et Arkéa Arena) et la production d’Artistes et spectacles vivants (-M-, Jean-Louis Aubert, Florent Pagny, Dutronc & Dutronc, Les Choristes…)
 
DIEGO : En quoi consiste ta fonction ?
JON POTIEZ : Elle consiste à développer les salles du groupe, notamment avec des opérations hors programmation (Comment mettre en avant les évènements que nous accueillons, comment pouvons-nous innover afin de délivrer la meilleure expérience à nos spectateurs…). Nous positionnons des marques et des destinations sur ces 4 lieux. Chacune d’elle à son histoire et se travaille différemment. 
 
DIEGO : Comment as-tu intégré le groupe ?
JON POTIEZ : Avec un coup de fil ! Avant cela, je dirigeais une agence de publicité basée à Bordeaux. Très vite elle s’est spécialisée dans la musique, notamment sur le développement des marques et des Artistes (Universal, Sony, NRJ, Warner, M6, Vitaa, Claudio Capéo, Kids United, Raphael…) 10 ans plus tard, Lagardère Live Entertainment est devenu l’un des clients de l’agence. Le projet de Arkéa Arena était grandiose, et humainement le feeling avec les équipes du projet était top. La suite s’est faite naturellement.
 
DIEGO : Une belle réussite professionnelle ! Pour revenir sur l’Arkea Arena, peut-on considérer qu’elle est la plus perfectionnée acoustiquement ?
JON POTIEZ : Ce ne serait pas très objectif de donner un avis personnel (rires) Néanmoins si je me fie au retour des producteurs qui passent à Bordeaux, ils disent souvent qu’elle dispose de l’une des meilleures acoustiques d’Europe avec la Seine Musicale de Boulogne. Ce retour est d’autant plus plaisant lorsqu’il vient des spécialistes… L’Arena du Pays d’Aix est également à la pointe niveau son. Cette salle est notre « écrin provençal », elle est vraiment magnifique en tous points. 
 

JON

 
 
DIEGO : Qui a conçu l’acoustique ?

JON POTIEZ : Christian Malcurt, un Pessacais incroyable, quelqu’un de talentueux mais qui est avant tout un passionné. Il a réalisé un travail de dingue, et ce n’est pas pour rien qu’il est une référence dans son domaine.  

 
 
 
 
DIEGO : Eventuellement, y’a t’il eu des ajustements sonores depuis janvier 2018 ?
JON POTIEZ : Non aucun. Christian et les ingénieurs de Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest m’expliquaient souvent que chaque élément aussi infime soit-il, est défini à une place bien spécifique et que tout changement pourrait avoir une incidence sur l’acoustique. Tout à été réfléchi et calculé en amont, notamment grâce à la maquette 3D qui permettait de travailler cette salle de façon inédite. Ce qui fait la différence lorsque vous venez voir un évènement plutôt qu’un autre, réside dans le choix du matériel et les équipes son de la Production. Lorsque les deux sont au top, vous êtes transportés dans un autre univers.
 
DIEGO : Une précision chirurgicale et mathématicienne ! Combien de personnes sont salariées de l’Arena, pendant et hors spectacles ?
JON POTIEZ : Nous sommes une quinzaine de salariés (Admin, Commercial, Food, Marketing, Technique) et pouvons monter à 350 personnes pour les plus grosses manifestations (sécurité, sûreté, intérimaires, croix rouge…)
 
DIEGO : Comment la société a surmonté cette crise sanitaire ?
JON POTIEZ : L’équipe “Admin” a beaucoup discuté avec les producteurs. Malgré la fermeture du site, nous étions en activité partielle et avons dû, comme beaucoup nous adapter et passer en télétravail. Le but était de reprogrammer et reporter les événements, ce qui fut le cas de la majeure partie d’entre eux. Le travail de nos équipes et de celles des productions que nous accueillons a été pharaonique. Il ne faut pas oublier qu’une ville n’est que l’une des dates d’une tournée, les artistes fonts très rarement de one-shot. Je te laisse imaginer le nombre de dates à recaler qu’il s’agisse d’une tournée française, européenne ou internationale… Sur Bordeaux, il a fallu recaler une, deux, trois fois certains évènements ! Notre but était de ne léser personne, ni les spectateurs, ni la production, ni la salle. 
 

Cela nous a également permis de réfléchir aux améliorations possibles en termes d’expérience-spectateur. Nous avions déjà créé plusieurs produits « money can’t buy » avec des expériences inédites et accessibles à tous comme l’ULTIMATE EXPERIENCE (un an de concert gratuit), la FAN EXPERIENCE (rencontre pour deux fans tirés au sort d’un artiste) et la BACKSTAGE EXPERIENCE. Nous avons profité de la période pour étoffer notre offre avec de nouveaux produits que nous dévoilerons bientôt. Nous avons également travaillé sur une toute nouvelle offre baptisée PRIORITY : Elle permet à chaque spectateur de bénéficier s’il le souhaite de plusieurs niveaux d’avantages lors de sa visite : Coupe-files, salon privatif dédié, offre de restauration incluse, remises chez nos partenaires et à Arkéa Arena … Peu importe le réseau auprès duquel il a réservé son billet, il peut choisir d’ajouter un Pass Priority ou Priority Lounge à un évènement. Nous l’avons lancé en soft opening récemment et les retours sont excellents. Nous préparons déjà une update qui devrait voir le jour en début d’année 2022. 

 
DIEGO : Le groupe LAGARDÈRE a t’il envisagé de vendre l’Arkéa Arena ?
JON POTIEZ : Non, le Groupe a d’ailleurs publié un communiqué de presse à la suite de ces rumeurs, ce n’est pas à l’ordre du jour. Bordeaux a longtemps attendu sa salle, et deux années de suite avant la pandémie, Arkéa Arena s’est classée comme première salle de France en termes de fréquentation hors ile de France. On peut en être gavé fiers !
 
DIEGO : Et comment s’annonce cette reprise ?

JON POTIEZ : Top ! Beaucoup de producteurs souhaitent venir et nous devons répondre à cette forte demande. Le public est ravi, il a « la banane ! » dès qu’il arrive sur le parvis. Nous en avons eu récemment la preuve lors des concerts de HANS ZIMMER et CHRISTOPHE MAÉ 

J’ai une pensée pour toutes les personnes qui travaillent autour des artistes : les roads, les techniciens, les machinistes, les riggers… On ne savait pas trop si nous allions pouvoir retrouver ces équipes, souvent des intermittents, forcés d’être à l’arrêt pendant de long mois. On parle souvent de l’industrie de l’Entertainment mais si on y regarde de plus près on est plus proches de l’Artisanat. Toutes les personnes qui y collaborent sont en en fait des spécialistes dans leur domaine. C’est une industrie artisanale ! Aujourd’hui avec la reprise, c’est bon de les retrouver et de les voir exceller dans leur métier. 

 

OBISPO

 
DIEGO : Et le live-streaming ?
JON POTIEZ : Je trouve que c’est très intéressant car c’est une extension du live. Mais cela ne peut remplacer un show. Un jour peut-être, mais les live stream, même s’ils nous ont permis de passer de bons moments dans une période compliquée, ne remplacent pas un concert. Le « noir-salle » lorsque le spectacle commence est une cassure avec le monde réel que j’adore. On oublie tout et le spectacle te coupe de la réalité pendant 2 heures. Ce que tu vas vivre ensuite, toutes ces émotions que tu vas ressentir, que tu vas recevoir et que tu vas partager, n’existent pas en streaming. 
 
DIEGO : Difficile d’avoir les mêmes rendus sonores et visuels qu’en live ! 

JON POTIEZ : Exact ! Même si on développe aujourd’hui des technologies incroyables comme le streaming en lossless ou encore le Dolby Atmos tout ça dans des écouteurs sans fil, le rendu en salle n’est pas comparable. Ce sont des expériences différentes. 

 
DIEGO : Le public est au rendez-vous ?
JON POTIEZ : Oui ! Et il a très envie de revenir. Il faut savoir que malgré les nombreux reports, les billets restent valables et qu’aucune démarche n’est à effectuer pour le spectateur. Tout a été automatisé. C’est un travail titanesque qui a été réalisé aussi bien du côté des salles, que des producteurs, que des réseaux de vente.
 
DIEGO : Quel est le programme à venir ?
JON POTIEZ : Alicia Keys qui outre Paris ne viendra qu’à Bordeaux, comme Shawn Mendes ! Star-Wars, Le Grand Bleu avec Eric Serra, Disney, Vianney, Vitaa & Slimane, Julien Doré, Aubert, Cabrel, EraSimple Minds, Harry Potter, Dream Theater, TexasEddie de Pretto, Gims, Jonasz, Gojira, Orelsan, Angèle, Clara Luciani, M… certains comme Jean Louis Aubert et Mathieu Chedid sont produits par LAGARDERE LIVE ENTERTAINMENT. Des ciné-concerts aussi comme Jurassic Park avec orchestre symphonique ou Pixar avec Symphonia Pop Orchestra
 
 
DIEGO : Les artistes ont envie de partager leur musique ! Y’a t’il “embouteillage” entre les reports et les nouveautés ?
JON POTIEZ : C’est une bonne chose. C’est un peu compliqué de trouver des dates afin de produire tous ces spectacles, je sais que notre équipe qui s’occupe du planning jongle beaucoup, mais il est rassurant de sentir ce besoin et cette demande. C’est sain et bénéfique. Nous cherchons une programmation hétéroclite, du hard-rock à Disney en passant par l’humour ! Nous contribuons à fabriquer des souvenirs, et souhaitons que tous puissent y avoir accès.
 
DIEGO : On se souvient tous de nos premiers concerts… Midnight Oil à Bercy en 1990 pour moi !
JON POTIEZ : Dorothée pour moi ! (rires) J’étais gamin, et j’en garde un très bon souvenir !
 

DIEGO : Tu es toujours fan du Cirque du Soleil ?
JON POTIEZ : Oui ! Je suis allé les voir à Las Vegas et dans d’autres villes. Ils sont venus à Arkéa Arena avec leurs productions « Ovo » et « Cortéo ». Je ne peux être objectif car je suis fan du Cirque Du Soleil qui existe depuis les années 80. C’est beau, c’est pro, c’est poétique, créatif et, alors que tout se passe devant tes yeux… cela reste incroyable.
 
DIEGO : On sent le passionné ! 

JON POTIEZ : Parfois en plein milieu du show, la scène se met à bouger et tu te rends compte qu’il y a un orchestre qui joue en direct depuis plus de 30 minutes alors que tu ne les avais même pas remarqués. A Las Vegas, la scène est une piscine à plusieurs fonds et tout est millimétré à la seconde… La salle du Bellagio a été conçue spécialement pour eux ! Au MGM Grand, leur scène se lève à la verticale… 

 
DIEGO : Un peu comme Goldman lors de sa tournée 2002 sur “Envole-moi” !
JON POTIEZ : Oui ! Mais là ils gravitent et combattent sur une scène à 90 degrés. C’est juste unique au monde.
 
DIEGO : Quel est le type de spectacle qui plait le plus aux Bordelais ?
JON POTIEZ : Je trouve que Bordeaux à une forte appétence pour ce qui est Pop/Rock mais tout dépend des goûts de chacun. Et cette différence est notre force. Ce serait ennuyeux si tout le monde aimait les mêmes choses. Parfois tu vis des évènements plus intensément avec des jauges de 1000 ou 6000 personnes plutôt que que 11 300 ! Et parfois c’est l’inverse. Si tu compares un concert de Coldplay au stade de France et un concert de Coldplay au Casino de Paris en intimiste, c’est totalement différent ! Ce qui explique que certains artistes oscillent entre les stades, les arénas/zéniths et les clubs. Gad Elmaleh par exemple enchaine les clubs et les arenas, je trouve ça génial. Le directeur du casino de Paris et des Folies Bergères Fréderic Jerome en parlerait bien mieux que moi… Ces salles qui ont vu MistinguettJoséphine BakerCharlie ChaplinColdplayMuse ont tous deux plus de 140 ans ! Elles ont su traverser le temps et se renouveler sans cesse afin de séduire tous les publics tout en s’adaptant aux techniques sonores actuelles. 
 

INDOCHINE

 
DIEGO : Plus personnellement et même si tu ne gères pas la programmation, quels artistes aimerais-tu voir jouer à l’Arkéa Arena ?

JON POTIEZ : Comme beaucoup, j’aimerais y voir Coldplay pour leur énergie. J’aurais adoré voir les Daft sur la scène aussi. Et plus personnellement je ne serai pas contre une rétrospective de Robbie Williams ! Quant au Cirque du Soleil, je te laisse imaginer ! (rires) 

Sur les concerts qui se sont déjà déroulés à Arkéa Arena, je pense à Depeche Mode parce que c’était l’inauguration et le résultat de plusieurs années de travail. J’ai adoré le show d’Imagine Dragons que je suivais déjà depuis quelques années. Et j’ai été bluffé par Mariah Carey qui à délivré une performance incroyable lors de sa venue à Bordeaux. Si je devais citer un artiste Français, ce serait Mathieu Chedid. A la fois parce qu’il est talentueux, mais aussi parce qu’il est extrêmement solaire et dispose d’une forme de communication unique avec son public. Il a cette facilité à transmettre des énergies et à nous transporter dans son univers. Il dégage à la fois une force dingue et parallèlement une fragilité saine, mais quelque chose de très réconfortant. 

 
DIEGO : D’ailleurs dans l’Arena, quelle est la meilleure place ?
JON POTIEZ : Tout dépend de ce que tu viens voir et de ce que tu veux ressentir. Il n’y a pas de meilleure place à proprement parler. Le fan ira à proximité de l’Artiste en fosse, parce qu’il veut le voir au plus près. Personnellement je préfère les gradins, parfois même au plus haut, cela me permet de voir l’Artiste, le groupe, le plan de feu et le global de la foule qui exulte. Par exemple la dernière tournée d’Indochine était géniale vue des gradins. Le public présent est là pour partager et communier. On fait abstraction du monde réel, on s’évade, on oublie tout et on vit l’instant présent. Même si ça peut paraitre très kitsch, c’est dans ces moment-là que nous pouvons trouver la plus belle définition de l’humanité ! 
 
DIEGO : “Ensemble” comme dirait Goldman qu’on aurait tant aimé voir se produire ici…
JON POTIEZ : C’est tout à fait vrai. Et c’est peut-être le mot qui caractérise le plus notre métier. Après tout ce n’est pas ce qu’il y a de plus beau ? 
 
DIEGO : Merci beaucoup Jon pour cette interview. Vive la musique, vive les concerts !
JON POTIEZ : Merci à toi !
 
 
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  • Remerciements : LAGARDÈRE LIVE ENTERTAINMENT / Jon
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