OLDELAF MeL

INTERVIEW OLDELAF @ DIEGO ON THE ROCKS

INTERVIEW #238 : OLDELAF

Depuis 15 ans, Olivier Delafosse dit OLDELAF publie des albums qualitatifs empreints d’humour qui ne laissent pas le public indifférent. Le parisien qui fêtera ses 50 ans en mai prochain a accepté de répondre aux questions de Diego pour Musiques En Live et sera en concert à l’Entrepôt du Haillan le 14 juin 2025. Il présentera aux Bordelais son dernier disque baptisé « Saint Valentin » sorti en octobre dernier. 
 
 

Diego : Quel bilan fais-tu de tes (presque) 15 années d’artiste solo et des 5 albums publiés ?

Oldelaf : Une fierté car en les réécoutant lorsque mon entourage le propose, j’ai le sentiment d’avoir composé de belles chansons. Cela représente le temps qui passe sans m’angoisser car j’ai accompli des rêves grâce à la musique et aux gens avec lesquels je bosse. Je me produis dans les salles que je souhaitais et mes musiciens sont quasiment les mêmes qu’aux débuts. Ma seule petite frustration est de ne pas avoir eu de morceaux en playlist pour les radios car cela reste notre cœur de métier. C’est un média puissant et je regrette cette absence, mon niveau de notoriété n’est pas en rapport avec mes chansons. Elles sont chantées dans les écoles, les chorales par de jeunes groupes et ont des millions de vues mais je n’en ai pas une seule en playlist sur une radio nationale. C’est dommage. Les succès sur internet comme « La Tristitude » sont différents et cette dernière n’a été proposée qu’en version live sur Rires & Chansons car c’est un titre classé humoristique.
 
IMG 0648
Diego : La carrière d’Oldelaf aurait-elle été similaire sans le financement participatif ?
Oldelaf : Je ne sais pas si cela aurait été si différent car cela permet d’avoir des conditions d’enregistrement top et l’argent récolté a également permis d’autres investissements. Je pense à l’album « Goliath » où nous avons perçu 80 000 euros ce qui m’a permis de réaliser un rêve en travaillant au studio Ferber. Cela a servi sur deux morceaux pour perfectionner les cordes, par contre je pense que les autres titres auraient sonné à l’identique dans un studio plus classique. L’argent qui n’a pas servi pour la production à été réinjecté dans le clip « Hotel Ibis » (qui a été interdit au moins de 18 ans) et je pensais pouvoir produire moi-même cet album. Je me suis rendu compte que c’était un « métier différent » de développer ton disque et d’en parler. En tout cas, j’ai eu de la chance avec le public et je ne crois pas que le crowdfunding soit l’élément déclencheur. Par contre, être chroniqueur sur Europe 1 a changé beaucoup de choses en apportant un public dans les salles qui connaît l’animateur et découvre le chanteur. Un changement notable comme après la parution du clip « Le Café ».
 
Diego : Le titre « Saint Valentin » pour ton dernier album est un faux-ami car il illustre une chanson dans l’album mais les autres sont loin d’être le bonheur du 14 février !
Oldelaf : C’est vrai mais pour moi la Saint Valentin ne représente pas toujours le cœur tout rose avec le bouquet de fleurs mais c’est une fête qui cristallise l’amour kitsch disant que tu n’as pas le choix ! Faut le faire ce jour-là mais les 364 autres jours m’intéressent aussi ! Certains sont heureux mais que font les autres ? Les célibataires, les malheureux en amour qui mangent à côté du couple en tenant la chandelle… L’album explique ces différentes facettes.
 
IMG 0650
Diego : Donc l’amour est un sujet inépuisable pour un auteur ?
Oldelaf : En tout cas, il y a autant d’histoires que de personnes. Nous avons des expériences diverses contenant les particularités s’y afférant. L’amour merveilleux, la maladie, l’échec, la fin… Les êtres humains permettent ces histoires encore plus diversifiées aujourd’hui avec l’ouverture d’esprit récente concernant les amours entre hommes et entre femmes.
 
Diego : L’album est sorti en octobre et le titre « Pas Adapté » m’a fait marrer lorsque je l’ai entendu pour la première fois dans ma voiture. Nous avons sensiblement le même âge et je me revois avec mes premiers émois il y a 40 ans… Est-ce que Stéphanie Mercier existe ?
Oldelaf : C’est un compliment que tu te sois reconnu dans ma chanson et non Stéphanie Mercier n’existe pas ! Du moins pas sous ce nom. Mon copain Ours m’a balancé un patchwork de toutes les « Stéphanie Mercier » qu’il avait trouvé sur facebook ! Le romantisme vu par un môme de 13 ans qui est maladroit, fasciné et qui a ses premières sensations lors d’un cours de sport en classe de 5ème. Je pense que c’est une chanson de garçons car les filles sont probablement plus raisonnables et matures.
 
Diego : Musicalement, un titre comme « Bonhomme » est très décalé !
Oldelaf : Complètement par rapport au sujet et je voulais faire ressortir le côté « gros dur » avec son 4×4 !
Diego : Comme une ôde à la « beauf-attitude » !
Oldelaf : Exactement. Pas une ôde mais plutôt un foutage de gueule.
 
Diego : Peux-tu me parler du clip de « Luxembourg » ?
Oldelaf : Il s’agit d’un titre sur une séparation relatant une vieille histoire d’amour qui reste gravée et les regrets liés aux endroits qui font remonter des souvenirs parfois douloureux. Généralement, on ne retourne pas au même endroit avec une nouvelle histoire d’amour car les images passées restent attachées à l’endroit en question. On idéalise des personnes et on vit avec ce souvenir sympathique. Il peut arriver de réinventer un endroit mais il ne faut pas copier-coller l’histoire finie. Le clip parle de cette problématique et a été tourné au jardin du Luxembourg à Paris.
 

 
Diego : « 100 » et « Mille milliards » sont des titres qui font référence à des BD, des Schtroumpfs à Tintin. Ce dernier suppose une homoséxualité entre Tintin et le capitaine Haddock. Hergé aurait-il pu en parler aussi librement dans les années 70 ?
Oldelaf : Je ne pense pas qu’à cette époque il était facile d’admettre l’homosexualité. C’est marrant d’apprendre que des gros durs qui jouaient les acteurs étaient homos, je pense à Jean Marais par exemple. Pour revenir à Tintin, je crois qu’il y a une relation particulière entre ce marin bourru et cet intrépide journaliste.
Diego : On imagine mal Popeye homosexuel !
Oldelaf : C’est complètement possible ! Le clip « Cargo de Nuit » d’Axel Bauer est devenu une référence pour la communauté gay. Habillé à l’époque par Jean-Paul Gautier ! D’ailleurs il existe une fresque à Paris où Tintin et Haddock s’embrassent à pleine bouche, c’est superbe. En 2024, il n’y a plus de honte à se cacher et la banalité est devenue normale.
 
Diego : Olivier préfère-t-il Oldelaf chroniqueur radio ou Oldelaf chanteur ?
Oldelaf : Le chanteur ! La chronique c’est du boulot mais ce n’est pas mon métier.
Diego : Néanmoins dans les deux cas tu joues sur les mots et la répartie !
Oldelaf : Il ne faut pas se tromper, je suis un intervenant dans une émission qui n’est pas la mienne. C’est une démonstration de ce qu’on sait faire pour parler de soi. C’est un métier rémunéré qui engage une quantité faramineuse de travail. Quoiqu’il arrive, je continuerais la musique même à effectif réduit si le succès ne devait pas être au rendez-vous.
Diego : Parle-moi de ton rôle dans la pièce de théâtre « Opération Bretzel » ?
Oldelaf : C’est un spectacle humoristique dans lequel on joue de la musique. De base, je me sens plus légitime en chanteur même si l’humour est dans mon adn. Je n’ai jamais pris de cours de théâtre ou d’écriture, j’ai la chance d’être avec Arnaud Joyet et notre spectacle combine rire, action et chansons.
Diego : Dès que tu es sur une scène musicale, as-tu une correspondance théâtrale ? Un côté représentatif ?
Oldelaf : Certains ont la chance d’avoir une prestance naturelle et tu as raison, le fait d’être sur scène oblige une attitude adaptée. La mise en scène pour un groupe de rock n’est pas toujours évidente car il faut s’adapter aux lumières et aux effets. Attention à ne pas se cacher derrière la mise en scène ! On m’a raconté la mise en scène du brillant trompettiste Suisse Erik Truffaz qui s’est baissé sur scène dos au public en négligeant son jean trop bas dévoilant ainsi sa raie du cul… sans intention initiale ! C’est moche… Dans ces cas-là, la mise en scène est importante. Je me rends compte qu’au fil des concerts on améliore la mise en scène et qu’au fil des tournées, on s’améliore tout simplement ! A ce jour, notre niveau d’exigence est élevé.
IMG 0646
 
Diego : Avez-vous un rituel avant d’entrer en scène ?
Oldelaf : Oui, nous avons un cri de guerre qui est évolutif en fonction des spectacles. Ce rituel dure depuis les débuts.
 
Diego : Quelles sont les 5 plus belles minutes de ta vie ?
Oldelaf : La naissance de mon premier enfant. J’ai revu toute ma vie lorsque la sage-femme l’a posé sur le ventre de ma femme. Un grand vide dans lequel tu revois ta vie en projetant la sienne.
 
Diego : Y’a t’il des personnalités avec qui tu aimerais aller au restaurant et de quoi parleriez-vous ?
Oldelaf : Oui ! Philippe Etchebest qui est peut-être présent dans la salle ce soir ! Nous parlerions de bouffe et c’est bien un projet d’éventuellement manger chez lui ce soir… nous avons déjà passé une soirée ensemble après un concert avec les Souchon. Le personnage de la télé joue un rôle mais le vrai gars est différent.
 
Diego : Pour finir, quels sont les plus beaux concerts que tu as vécus en tant que spectateur ?
Oldelaf : Paul Mc Cartney en 1993 à Bercy pour la tournée « Paul Is Live ». D’ailleurs je vais le revoir en décembre à l’U Arena ! Le groupe Debout Sur le Zinc à la Cigale de Paris vers 2012. J’ai pleuré trois fois en concert, la première avec Debout Sur le Zinc et les deux autres fois à mon mariage avec mon ami régisseur sur la chanson de Claude Michael Schonberg, « Le Premier Pas ».
Diego : Merci à toi et avec un peu d’avance, bonne année 2025 ! On se retrouve le 14 juin 2025 à l’Entrepôt du Haillan !
Oldelaf : Avec plaisir, merci à vous deux.
 
  • Remerciements : Bérénice pour PAPIER MUSIQUE
  • Photos : Emma Derrier
  • Relecture : Jacky G.