L’APPEL DU GRAND CACIQUE RAONI – CLIMAX FESTIVAL 2019

Le Grand Témoin du Climax Festival 2019 : Raoni Metuktire

Le Climax Festival se tiendra à Bordeaux du 5 au 8 septembre 2019. Cette année, le thème est plus que d’actualité, avec les incendies qui dévastent actuellement le poumon vert de la planète : “L’Amazonie, ou le déracinement du monde”.

Le festival invite le plus grand nombre à se rassembler pour ces quatre journées de célébration de l’Amazonie, de toutes les forêts du monde, de leurs peuples et leur biodiversité à travers des concerts, des conférences et les prises de parole de grands témoins.

Un de ces témoins majeurs et mis en avant, que vous pourrez retrouver le 7 septembre de 16h à 17h30, est Raoni Metuktire, Grand cacique emblématique du peuple Kayapo, vivant au coeur du territoire indigène de Capoto-Jarina. Raoni est devenu, au fil des années, une figure internationale de la lutte pour la préservation de la forêt amazonienne et des cultures autochtones.

En 40 ans, Raoni a su franchir les gouffres culturels, poussé par un pragmatisme vital, celui du guerrier, obstiné et insoumis qui poursuit son combat pour sauvegarder les terres et la forêt qui l’ont vu naître.

Le Grand cacique fait l’honneur de sa présence à Climax en qualité de grand témoin, accompagné de ses proches compagnons de résistance. 

Hier (le 26/08/2019) à Biarritz, à l’occasion de la clôture du G7, le Climax organisait une conférence de presse avec la présence de Raoni et de sa délégation, qui avait fait le déplacement auprès des chefs d’Etats pour, notamment, leur faire part de la “Déclaration des organisations de la société civile sur la crise de la déforestation et des incendies en Amazonie brésilienne”. 

Philippe Barre, créateur de Darwin et co-fondateur du Climax Festival, a ouvert la conférence avec un discours clair, précisant les objectifs du Climax Festival (vidéo d’origine présente sur la page Facebook du Climax festival).  Cet événement a pour but de “travailler à des solutions” avec les ONG, les parlements etc. pour “mettre en place un discours qui relaierait les cris d’alerte” que les minorités ethniques “lancent depuis des dizaines et des dizaines d’années”.

Le festival est l’occasion d’un travail avec les intervenants de l’événement pour trouver des voies et des moyens de se faire entendre et, surtout, d’agir. Philippe Barre a bien souligné cette notion d’action, au vu de l’urgence de la situation. “L’objectif, avec toutes les délégations présentes [au festival] est de se relier en archipel des consciences et d’arrêter d’être une mosaïque flottante face aux populismes et aux fascismes montant, avec de l’efficacité, des causes qui se servent les unes des autres”. Il faut “arrêter de lutter seuls contre des fascistes et des populismes”.

Le créateur de Darwin a mis en avant que le  but de ces rencontres et des conférences organisées par Climax est de “réfléchir à des actions juridiques concrètes”. Des “projets de recours” ont même été mentionnés par Philippe Barre, qui a su garder le suspense en mentionnant que des annonces auraient lieu à la fin du festival. Le rendez-vous est donc pris.

Avant de laisser la parole à la délégation indigène, Philippe Barre a rappelé que l’accueil de Raoni et de sa délégation n’est pas seulement l’occasion de prendre des photos avec eux pour s’afficher, comme le font beaucoup, mais que cela traduit une “volonté de faire des choses concrètes”. Raoni et son discours sont “une leçon pour réapprendre et se reconnecter à un bon sens profond”. Ce message  “simple” mais qui tient “du bon sens”, se résume en peut de mots :“stopper la dévastation, rendre à la Nature, sa nature”. Pour conclure, le co-fondateur du festival Climax, a fait référence au thème de l’événement, en soulignant que l’Amazonie est le symbole du déracinement du monde, mais qu’elle n’est pas la seule…

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Suite à cette introduction, Raoni et sa délégation ont pris la parole pendant plus d’une demi-heure afin de faire passer leur message et répondre à quelques questions du public présent sur place. En voici la transcription :

Raoni :

Bonsoir à tous, c’est un jour incroyable pour nous. On a parlé avec le président Macron, sur beaucoup de sujets. Tout le monde sait qu’aujourd’hui au Brésil on a un grand problème et nous sommes tous préoccupés. Les forêts et les terres qui sont au Brésil nous aident tous à l’échelle de la planète à respirer, à vivre. Je voudrais savoir ce que vous pensez, tous, de la biodiversité. Car notre nouvelle génération et nos petits enfants ont besoin de cela. Pendant longtemps, j’ai rencontré des leaders au Brésil. Depuis le gouvernement de Dilma [Rousseff (2010-2014)] on n’a pas eu beaucoup d’attention. Et maintenant, avec le gouvernement de Bossonavo, c’est pas bon non plus. Je n’ai jamais voulu avoir de conflit avec d’autres peuples, et à mon avis, c’est Bossonavo le principal responsable de tout ce qui se passe en ce moment au Brésil. Je voudrais dire, que cela fait longtemps que, moi et mon peuple, on voudrait vivre avec la chasse, la pêche et les autres produits de la nature. Quand nous avons pris contact avec l’homme blanc, beaucoup de choses ont changé. Même comme ça, il faut qu’on vive en paix et qu’on puisse trouver une façon de vivre ensemble. On ne peut pas être violent entre nous. Au Brésil, les fermiers sont contre nous, ils demandent aussi au gouvernement d’être contre nous. Je viens d’une famille de leaders, et je comprends l’importance que nos relations continuent sans violence. Et aujourd’hui, je demandais encore à Macron qu’il nous aide à préserver notre terre. Toutes les communautés, nous les Indiens et vous les blancs, il faut qu’on trouve un moyen de vivre ensemble dans la paix. C’est ce que j’ai à vous dire aujourd’hui.

Cayoulou (Représente des femmes de 16 peuples d’Amazonie)

L’Amazonie concerne tous les peuples. Si l’Amazonie meurt, nous mourrons aussi. Le problème de l’Amazonie n’est pas uniquement un problème d’autochtones, c’est aussi le problème de tous les peuples. Je ne suis pas préoccupée par mon futur, mais je suis préoccupée du futur de mon fils. Et pas que des générations actuelles de notre peuple autochtone mais aussi pour vos enfants. L’Amazonie est tout pour nous, elle est notre maison, c’est notre pharmacie, c’est notre marché… Tout ce qui existe dans l’Amazonie, on en a besoin. L’Amazonie est vie : l’eau c’est la vie, la forêt c’est la vie. Sans elles on ne peut pas vivre. Je vous invite tous à sauver ce qui nous reste. On va sauver l’héritage de nos prochaines générations. Si on ne s’en occupe pas maintenant, que va t-il rester aux prochaines générations? Le Brésil dit que les peuples autochtones sont en retard pour le futur. Mais ça, ce n’est pas vrai. La société des peuples non autochtones insiste à dire que nous ne sommes pas des gardiens de la forêt. Ils disent que c’est beaucoup de terres pour peu de population. Mais en vrai, c’est peu de peuples autochtones pour protéger la forêt. Je vous remercie de m’avoir écouté.

Après ces deux discours forts en images et en sens, impliquant l’ensemble de la population de la planète, une séance de questions-réponses a été mise en place:

Question: Emmanuel Macron reconnaît ce soir que la France a une part de complicité dans ce qui se passe en Amazonie, est ce que c’est quelque chose qu’il vous a dit directement? Et qu’est ce que vous avez à y répondre?

Réponse de Raoni :  Je me suis senti content de la parole de Macron, j’ai bien aimé ce qu’il a dit. Je pense qu’il va tenir la promesse qu’il m’a affirmée aujourd’hui.

Q : Et quelle promesse?

Raoni  : Il a promis de parler avec les leaders du G7 pour appeler leur attention au sujet de l’Amazonie.

Q : (à propos des puissants du G7)  Que pensent-ils des incendies en ce moment dans l’Amazonie et que peuvent-ils faire pour les prévenir? / en prévention?

R : Ce qu’a dit Macron, c’est qu’il va essayer de convaincre les chefs d’Etat pour aider l’Amazonie contre les incendies et tout ce qui se passe en ce moment, c’est un état critique.

Q : Une déclaration sur le président Brésilien dit qu’il est le responsable de ces incendies, est ce que vous soutenez ces propos? Quelle est votre opinion sur Bolsonaro?

R : On croit que le positionnement du président Bolsonaro à incité les fermiers et les promoteurs à faire cela, à mettre feu à l’Amazonie. Tous les ans, ça arrive, mais là c’est puissant, c’est plus fort, vu que les entreprises minières en profitent.

(Après une légère pause)

R : Je vous remercie c’était une journée fatigante pour nous, mais je vous remercie de cette interview. Et on y croit !

Pour aller plus loin:

Découvrez le message de Raoni en vidéo concernant les incendies en Amazonie  :

Suivez l’actualité de Raoni sur raoni.com

Découvrez le Climax festival en cliquant ici et sur climaxfestival.fr

 

Amandine CARREAU