MISTY – CHRONIQUE BD @ALAIN SALLES
Misty – Par Pat Mills et Malcolm Shaw chez Delirium
Delirium poursuit son travail d’adaptation des trésors de la bande-dessinée britanniques avec une anthologie consacrée à Misty, magazine hebdomadaire destiné à être l’équivalent féminin de 2000 AD . A l’initiative de ce projet, nous retrouvons l’incontournable Pat Mills. Difficile de croire qu’il y ait eu des comics en Grande Bretagne avant Mills…Ou du moins des histoires originales, fortes, avec un visuel à la hauteur, et suffisamment matures pour intéresser des adolescents voire des adultes !
Pat Mills a débuté dans des magazines destinés aux jeunes filles comme Tammy. De fait, il ne paraît pas si surprenant que le scénariste de La Grande guerre de Charlie(Delirium), ABC Warriors, Marshal Law, Slaine, ou, plus récemment, Requiem (avec Olivier Ledroit) soit à l’origine de Misty. La vision d’un magazine pour adolescentes qui aimerait les films fantastiques comme Carrie (de Brian De Palma) ou Audrey Rose (de Robert Wise), tout en les mettant au centre des intrigues, avait fait son chemin dans son esprit visionnaire.
A l’instar de 2000 AD, Misty bénéficiait d’un grand tirage et, malgré le public ciblé à la base, finissait par être lu par toute la famille (!). Ce phénomène peut sans doute paraître inattendu, surprenant, vu de notre pays qui a longtemps méprisé les bandes-dessinées pour cantonner leur lecture aux enfants, voire aux jeunes adolescents. C’était encore plus saillant quand il s’agissait du fantastique et de ses cousins, sans parler d’une quasi négation de la sectorisation de la lecture de la bande-dessinée comme tout autre support. Ce que les américains et les japonais avaient intégré depuis longtemps !
Pour revenir à l’oeuvre qui nous intéresse ici, ce recueil rassemble cinq histoires complètes (en bichromie), traduites pour la première fois en français, parues entre 1978 et 1979. Ces récits sont écrits par Mills et Malcolm Shaw, dont la contribution à Misty a marqué une carrière malheureusement écourtée par la maladie. Graphiquement, ils jouissent d’un visuel d’excellente qualité, les dessinateurs (Juan Ariza, John Armstrong, Maria Barrera Castell, Mario Capaldi, Brian Delaney), au style plutôt réaliste, maîtrisant les deux aspects principaux de chaque histoire : l’adolescence et le fantastique ! Le tout à la façon des feuilletons populaires, ce qui est plutôt adapté pour un magazine hebdomadaire.
Delirium fait un véritable travail d’utilité publique en donnant enfin l’accès aux bandes-dessinées qui ont révolutionné le neuvième art Outre-Manche. Une chance de rattraper le temps perdu, c’est pas si courant…
Alain Salles