
INTERVIEW FATOUMATA DIAWARA @ DIEGO ON THE ROCKS
INTERVIEW #242 : FATOUMATA DIAWARA
Pour le plus grand plaisir des fans de world music, Fatoumata Diawara était au Rocher de Palmer en février et notre chroniqueur Diego a rencontré l’artiste. Elle sera de nouveau en Gironde en juin pour le festival ODP à Talence au profit des Orphelins des Pompiers avec Matthieu Chedid pour un nouveau spectacle baptisé « Lanomali 2 ».
Musiques En Live remercie Nicolas Humertjean et Alexia (@troubleshooteur) pour les photos.
Diego : Tu es passée en concert au Cognac Blues Passions en 2024, quels souvenirs en gardes-tu ?
Fatoumata : Tous les concerts sont particuliers. Le lieu, l’accueil, la nourriture et les gens sont différents mais j’ai souvenir d’un accueil chaleureux à Cognac et en général, tous les spectacles sont des cadeaux de dieu !
Diego : Tu es notre soleil musical car nous te reverrons également en juin avec Matthieu Chedid pour un nouveau spectacle sur le Mali ! En deux mots, qu’est-ce que le folk « Wassoulou » ?
Fatoumata : J’ai débuté ma musique sous une forme acoustique mais aujourd’hui cette ambiance a pris une autre voie avec mon troisième album. J’ai fait évoluer cette tradition Malienne puissante, une culture large et diversifiée, je me permets de passer au folk plus classique en incluant de la pop, du rock, du reggae et du blues.
Diego : Raisons pour lesquelles tu te produits dans des festivals hétéroclites ! Qu’apportent tes collaborations avec des stars comme Dee Dee Bridgewater, Bobby Womack et Damon Albarn ?
Fatoumata : J’avoue avoir eu de la chance mais je crois également au destin. Il n’y a pas de hasard et nous devions faire quelque chose ensemble, c’était « prévu » ! Cette alchimie est primordiale. Lorsque je suis avec Damon, nous passons notre temps à rigoler et on se sent bien… il est impossible d’avoir une telle affinité avec tout le monde. On le sent ou on ne le sent pas. L’art est vaste et tu peux aimer la musique d’une personne sans ressentir d’affinités humaines particulières. Lorsque la musique et l’humain se rejoignent, on en profite et on collabore dès que possible.

Diego : Par contre, Damon n’est pas dans le clip de « Nsera » même si son image est partiellement projetée sur un mur ?
Fatoumata : C’est vrai ! Mais tu te trompes, il est dans le clip et il était là le jour du tournage. En fait, Damon n’aime pas être physiquement présent dans ses clips et il n’apparait qu’en dessin animé comme pour le projet Gorillaz. Depuis 40 ans, je suis la seule avec qui il apparait en chair et en os ! On a pris une journée pour l’avoir avec nous, le clip a été enregistré pendant la tournée Gorillaz à Los Angeles. C’était une volonté du réalisateur qui voulait que l’on comprenne qu’il s’agit d’un de mes titres avec Damon en invité et pas l’inverse !
Diego : Autre sujet plus sérieux, ton investissement dans la défense des femmes et des enfants. Une priorité ?
Fatoumata : C’est mon moteur ! Comme beaucoup d’artistes, je suis très sensible et nous tentons de l’exprimer sur scène en harmonie avec le monde. Ces énergies sont primordiales, j’ai eu une enfance particulièrement difficile, j’ai appris à vivre avec, la musique m’a permis de m’en sortir. Dieu m’a donné la chance de vivre, survivre, danser même sur des histoires dramatiques. Il faut donner espoir aux enfants et même si ton enfance est ratée, la vie qui suit peut être réussie et j’en suis le parfait exemple ! Les gens ne doivent pas se limiter aux moments difficiles passés.

Diego : D’ailleurs y’a t’il un message pour les femmes dans le clip de « Seguen » avec les bâches en plastique ?
Fatoumata : Oui bien sur ! Cela exprime la souffrance. Il y a un message, la femme sur la scène finale a des contusions et le mot « Seguen » veut dire « intolérance, souffrance ». Toutes les injustices auxquelles les femmes sont confrontées, au Mali ou ailleurs, méritent d’être dénoncées. L’émancipation des femmes est plutôt réservée aux pays occidentaux mais dans beaucoup de pays les femmes sont fatiguées, oppressées, maltraitées et souffrantes.
Diego : Parfois l’homme est méchant et c’est lamentable ! Qui a eu l’idée de faire une suite à « Lanomali », Matthieu Chedid ou toi ? Qu’est ce que cette suite aura de plus ?
Fatoumata : Les deux ! Après la Covid, nous nous sommes manqués et après toute une série de concerts de Matthieu au Zenith de Paris, il trouvait que nous n’avions pas le temps de profiter l’un de l’autre. Trois titres en live c’est trop court pour apprécier l’instant ! Lors d’une soirée, nous nous sommes convenus qu’il fallait un nouveau projet afin de repartir sur la route.
Dans cette suite de Lanomali, il y aura la maturité en plus ! On se connaît beaucoup mieux qu’en 2017, nous avons évolué musicalement grâce aux nombreuses collaborations de part et d’autres.
Diego : Un homme irremplaçable !
Fatoumata : Oui, nous avons la chance d’avoir une liberté totale d’expression et je peux décider avec qui je collabore. Damon et Matthieu auront toujours leur place à part dans mon répertoire.
Diego : Quelles sont les 5 plus belles minutes de ta vie ?
Fatoumata : Les 5 premières minutes de mes concerts. J’arrive en pleurant ! Après il y a beaucoup de moments extraordinaires lorsqu’on vit un concert de la scène. Hier à Nantes, ce soir à Bordeaux et bientôt ailleurs…

Diego : As-tu un rituel avant de monter sur scène ?
Fatoumata : Oui je prie. J’appelle mes ancêtres, je leur donne de l’eau, du vin, je les invoque pour qu’ils m’accompagnent sur scène.
Diego : Pour finir, quels sont tes plus beaux concerts vécus en tant que spectatrice ?
Fatoumata : Damon et Matthieu bien sur !!! Ce sont mes frères de vie et de scène.
Diego : Merci Fatoumata, on se retrouve en juin au festival ODP !
Fatoumata : Merci !
- Remerciements : Nicolas Humbertjean
- Photos : Alexia @troubleshooteur
- Relecture : Jacky G.